Aller au contenu principal

Mort de Didon sur le bûcher (Énéide, Vat.Lat.3225)

Notice précédente Notice n°16 sur 32 Notice suivante

Date :
Entre 360 et 410
Nature de l'image :
Enluminure
Sujet de l'image :
Vat. Lat. 3225, f°41r

Analyse

« Dixerat, atque illam media inter talia ferro
conlapsam aspiciunt comites, ensemque cruore
spumantem sparsasque manus. It clamor ad alta
atria ; concussam bacchatur Fama per urbem.
Lamentis gemituque et femineo ululatu » (IV, 663-667)

[Elle parlait encore que ses femmes voient l’infortunée s’affaisser sous le fer mortel et le sang écumer sur l’épée et ses mains en être éclaboussées. Un cri monte sous les voûtes du palais et le Renommée fait la bacchante dans la ville frappée d’horreur.]
   
L'image suit les développements de la douleur d'Anna, la sœur de Didon, qui est représentée trois fois.
  Une première fois à gauche, elle sort du palais et, voyant Didon expirante, elle se lacère le visage et la poitrine (ora… foedans et pectora pugnis, v. 673). Sur l'image, à l'exception de Didon, Anna est la seule femme dont les épaules sont dénudées et se reconnaît à cela. Dans cette première représentation, qui est une entrée en scène, Anna est accompagnée d'une suivante en robe bleue. Anna est la protagoniste de l'image et, comme telle, doit être accompagnée.
  Une deuxième fois à droite de la porte, au pied du lit de Didon, Anna montre du doigt sa sœur expirante. C'est le temps du discours d'Anna, ponctué par les hoc, le ça, le voilà, qu'elle désigne comme la catastrophe que Didon a machinée à son insu.
  Une troisième fois complètement à droite sur l'image, au dessus du lit, Anna lève les bras au ciel : prise de délire, elle commande de l'eau à ses femmes, pour laver la plaie de sa sœur et recueillir d'elle un ultime souffle.

Entre ces trois temps, le dessinateur a établi une gradation : à chaque fois, Anna est placée plus haut : certes elle est supposée gravir le bûcher, (gradus evaserat altos, v. 685), mais l'image donne un sens symbolique à cette ascension. Anna occupe, domine la pièce, la scène : elle conquiert, à la place de sa sœur, la position de sujet de la performance. L'image se lit par différence avec la précédente, du folio 40r°, occupée exclusivement par le discours de Didon se suicidant. C'est de cette chambre du suicide, dévolue à l'action, à la performance de la reine, qu'il s'agit ici de se rendre maîtresse.

Ces deux enluminures du suicide de Didon et de la douleur d'Anna sont sans doute les plus célèbres du volume. La première fut copiée et gravée dans le cercle de Raphaël à la Renaissance. Dans la seconde (celle-ci), les figures furent mal interprétées : on ne vit plus Anna entrant, Anna montrant du doigt le suicide, Anna commandant de l'eau, mais des femmes autour du lit de la mourante, selon une logique scénique et spectaculaire qui était anachronique.

Annotations :

2. Folio 41 recto.

Sources textuelles :
Virgile, Énéide, Livre 04 (Passion et suicide de Didon)
v. 663-667

Informations techniques

Notice #014819

Image HD

Identifiant historique :
B4138
Traitement de l'image :
Image web
Localisation de la reproduction :
Wikimedia commons