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Ixion trompé par Junon - d’après Francesco Salviati

Date :
Entre 1550 et 1560
Nature de l'image :
Gravure sur cuivre, taille-douce (au burin)
Dimensions (HxL cm) :
28,8x17,8 cm
Sujet de l'image :
Inventaire Eb.6b.rés.fol. (C. 3285)

Analyse

En bas à droite, l’auteur des deux quatrains est agenouillé, les bras levés. Le poème délivre le contenu de sa prière. Le premier quatrain évoque l’union d’Ixion, élevé par Zeus au rang d’échanson des dieux, avec Junon dont il est tombé éperdument amoureux.
Mais cette union est un leurre : il n’étreint qu’une Junon de nuée, une Junon fictive.
Dans le mythe grec, c’est Jupiter et Junon qui préparent cette fausse Junon, pour prendre au piège Ixion, fournir la preuve de sa trahison, et le précipiter aux Enfers. En haut à droite, c’est bien Junon, identifiable au paon à ses pieds, qui fabrique son sosie nébuleux.
Mais le poème suggère autre chose : Ixion y devient la métaphore de l’amant malheureux, qui faute d’embrasser l’objet de son désir, se nourrit de songes. Le poète qui prononce les vers serait prêt à se contenter de cette satisfaction nébuleuse, virtuelle, de cet amour en rêve, si le rêve n’enfantait pas lui-même toute une série de monstres. Cet enfantement et ces monstres font allusion au fait que dans le mythe Ixion a engendré, par son accouplement avec la fausse Junon nébuleuse, des enfants monstrueux : les Centaures, mi-hommes mi chevaux, qui entreront en guerre contre les Lapithes, dont Ixion était primitivement le roi.
Sur l’image, les retombées monstrueuses de cette union en rêve sont représentées par le paysage de ruines où l’on distingue, à gauche une statue de faune renversée, une autre de lion, à droite un satyre à califourchon sur un tronc d’arbre déraciné.
La prière du poète et la représentation de son songe prennent tout leur sens si on les met en relation avec l’homosexualité de Salviati : le rêve est un rêve de coitus a tergo, et la Junon musculeuse qu’étreint Ixion contraste avec les formes beaucoup plus féminines façonnées, en haut à gauche, par Junon.

Annotations :

1. Sous la gravure, on peut lire les deux quatrains suivants :

Nubiloso pensier arse Ixione / Une pensée nébuleuse enflamma Ixion
E in una nube spense quel pensero / Et dans une nuée il répandit ce songe
Che credendo goder la sua Giunone / Si bien que croyant jouir de sa Junon
Abraccio l’ombre de l’amato vero / Il embrasse l’ombre de ce qu’il aime vraiment
O’che felice e lieta visione / O quelle heureuse et joyeuse vision
S’andar potea di tant’Amor altero / Si l’on pouvait s’enorgueillir d’un tel Amour
Senza sparger quel seme onde le torme / Sans répandre cette semence d’où les monstres
Nacquer di sí diverse e strane forme. / Naquirent de si diverses et étranges formes.

2. Le dessin préparatoire de Salviati, exécuté à la sanguine vers 1548-1550 (25,3x17,3 cm), est conservé à Santa Barbara, university art museum, collection Feitelson.

Informations techniques

Notice #009642

Image HD

Identifiant historique :
A8961
Traitement de l'image :
Scanner
Localisation de la reproduction :
Collection particulière (Cachan)
Bibliographie :
C. Monbeig Gogel, F. Salviati ou la Bella maniera, RMN, 1998
n° 77, p. 212