Aller au contenu principal

Justinian grâcié par Astérie (Ibrahim, ou l’illustre Bassa, éd. 1723, vol. 1)

Notice n°1 sur 4 Notice suivante

Date :
1723
Nature de l'image :
Gravure sur cuivre
Sujet de l'image :
LFr83 (1-4) in-12

Analyse

Justinian a été capturé par des corsaires turcs aux ordres de Bassa Sinan et emmené à Constantinople comme esclave. Ses compagnons tentent de s’enfuir, mais leur complot est découvert. Bien que Justinian n’ait pas participé à cette tentative d’évasion, le sort le désigne pour être condamné, d’abord parmi trente, puis trois, puis seul, « à être exposé au plus cruel supplice de ce pays-là » (p. 247). Il s’y rend sans faiblir, heureux de mourir alors que le sort semble l’avoir définitivement séparé de la dame de ses pensées, Isabelle, qu’il croit mariée au prince de Masseran :
    « pour aller du lieu où mon arrêt avoit été prononcé, jusqu’à celui où l’on devoit l’executer, il faut passer devant une des faces du serrail : mon bonheur voulut que comme nous arrivâmes en cet endroit, la Sultane Asterie, fille du Grand Soliman étoit appuyée sur une fenêtre, dont elle avoit haussé la jalouise, voyant de loin cette multitude de peuple qui m’accompagnoit, & qui témoignoit par son action, prendre quelque part à mon infortune, le hazard fit qu’elle porta les yeux sur mon visage, & qu’elle y trouva quelque chose qui lui donna de la curiosité. Elle commanda donc à ceux qui me conduisoient de s’arrêter ; & leur demanda quel crime j’avois commis. J’ai sù depuis, car je n’entendois pas encore bien la langue, [252] que quelqu’un d’entr’eux lui dit que j’étois innocent, & lui raconta par quel malheur j’étois en cet état ; en exagerant avec beaucoup d’ardeur l’opiniâtreté de la fortune à me choisir toûjours ; & la constance que j’avois témoignée en cette rencontre.
    Tant que ce discours dura, je remarquai qu’elle me considera avec beaucoup d’attention : de sorte que connoissant par quelques mots que j’avois déja appris durant le voyage, & par les actions qu’elle faisoit qu’elle parloit de moi, & qu’elle me plaignoit, je la saluai avec un profond respect. Enfin, Madame, la jeune Sultane Asterie fut si genereuse, qu’après avoir demandé & su de quelle nation j’étois, elle défendit expressément à ceux qui me conduisoient, de partir de-là qu’ils n’eussent un ordre du Grand Seigneur. Eux qui connoissoient & le rang & le credit que la Sultane avoit auprès de Soliman, n’avoient garde de manquer de suivre ses ordres : comme en effet elle fut à l’heure même trouver l’Empereur son pere, qui pour lors se rencontra heureusement dans le vieux serrail où elle étoit, & qui n’est habité que de la mere, des sœurs, des filles, & des tantes du Grand Seigneur. Là elle le supplia de lui donner la vie [252] d’un esclave Italien & innocent, que le Bassa Sinan lui avoit destiné, & qu’il vouloit faire mourir, pour servir d’exemple seulement.
    Après qu’elle eut obtenu l’effet de sa priere, elle n’en demeura pas là : car elle dit tant de choses de ma constance, & de ma resolution à Soliman, qu’elle lui fit naître l’envie de me voir : de sorte qu’en envoyant le commandement de me délivrer, je reçus ordre par un truchement d’aller trouver le grand Seigneur. »
   (Ibrahim ou l’illustre Bassa, Première partie, Livre cinquième. Récit de Justinian à Isabelle, après leurs retrouvailles à Monaco. Début p. 245.)
    L’étrange coiffe d’Astérie ne trouve pas d’explication dans le texte, ni la sorte de lance que porte Justinian, probablement l’instrument du supplice auquel il était destiné. Le supplice de la roue ?

Annotations :

2. Frontispice du premier volume, illustrant un épisode du livre V.

Sources textuelles :
Scudéry, Ibrahim, ou l’illustre Bassa (1641)
Première partie, livre cinquième

Informations techniques

Notice #006604

Image HD

Identifiant historique :
A5923
Traitement de l'image :
Photographie numérique
Localisation de la reproduction :
Collection particulière (Cachan)