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Roland au château d’Atlant(Roland furieux, Valgrisi, 1560, chant 12)

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Attribution incertaine
Date :
Entre 1556 et 1560
Nature de l'image :
Gravure sur bois
Dimensions (HxL cm) :
21,5x14,3 cm
Sujet de l'image :
Résac yd 389

Analyse

Au premier plan, Roland (OR) monté sur Bride-d’Or poursuit un cavalier portant dans ses bras une jeune fille qu’il croit être Angélique (str. 6) : il s’agit en fait d’une illusion forgée par Atlant pour l’attirer dans son château enchanté au second plan.

Au second plan à droite, Roland tente de rattraper le ravisseur, qui pénètre dans le château (str. 8). Dans le château, on distingue une cour intérieure dallée : par différentes portes, les chevaliers entrent et sortent, chacun poursuivant l’objet imaginaire de son désir : Roland au centre gravit les escaliers (str. 9). Roland est représenté une nouvelle fois à pied à l’extérieur du château, levant les bras pour tenter d’attraper Angélique, que son ravisseur semble vouloir jeter à terre depuis le premier étage (str.14-15).

Parallèlement à l’histoire de Roland, d’autres chevaliers sont pris au piège du château : rivaux potentiels de Roger dont Atlant protège la vie en le maintenant prisonnier dans le château, ils poursuivent tous un simulacre et entendent la même voix invisible. Roger à droite (RVG) est à la recherche de Bradamante (str. 17-20), Brandimart (BR) à gauche cherche Fleur-de-lys. Au centre, dans la cour, Ferragus reconnaissable à sa tête nue (str. 30-31 ; sous lui, le FE est corrompu) fait face à Roger sans le voir (str. 32).

Cependant la véritable Angélique, protégée par son anneau d’invisibilité, a à son tour pénétré le château à la recherche d’un fidèle chevalier servant qui accepte de l’accompagner sur son chemin de retour en Chine. Au premier étage, dans la fenêtre centrale, Roland (OR), suivi de Sacripant (SA) et de Ferragus (FE) visibles depuis la fenêtre de gauche (str. 11), se retrouvent donc face à la véritable Angélique (AN), qui leur fait face à la fenêtre de droite (str. 29) : dans le texte, c’est à Sacripant qu’Angélique apparaît, ôtant l’anneau d’invisibilité de sa bouche ; c’est lui qui devrait s’inscrire dans la fenêtre centrale, Roland et Ferragus n’arrivant que derrière. Le graveur a suivi une autre logique, symbolique : le couple impossible formé par Angélique et par Roland est plus important, c’est lui qui doit être mis en valeur, quitte à ne pas respecter les données factuelles et ponctuelles de la narration.

A l’extérieur du palais, sur la droite, à hauteur du premier étage, Sacripant, Ferragus et Roland poursuivent Angélique à cheval (str. 33-35). Au-dessus, Ferragus (FE) et Roland (OR) s’affrontent à propos du casque de l’Argail (str. 40-45), accroché à un arbre par Roland le temps du combat (str. 46). Angélique (AN), qui est censée être invisible à ce moment du récit grâce à l’anneau, tend le bras pour dérober le casque (str. 50-53). Au-dessus, Ferragus (FE) récupère le casque, tombé à terre près d’une mare (une fontaine dans le texte) au moment où Angélique qui s’y reposait, entendant arriver le chevalier, s’était rendue à nouveau invisible (str. 57-60). A gauche de Ferragus, Angélique à cheval (AN) s’enfuit.

Pendant ce temps, Roland, au-dessus du toit du palais d’Atlant, met en déroute les troupes de Manilard (MAN) et d’Alzird (ALZ), chefs sarrazins, devant Paris : il tue Alzird (str. 75-76) et met à terre Manilard (str. 83-84). Derrière Paris, dans les montagnes, Roland (OR, peu lisible) pénètre dans la grotte des brigands, où l’on distingue Isabelle, une table de pierre et, au fond à droite, la duègne qui surveille Isabelle (str. 91-92).

La composition d’ensemble de la gravure est tripartite :
En bas, Roland poursuivant le ravisseur de la chimère d’Angélique constitue l’espace de la contre-performance, le contraire du face à face agonistique. Le tronc coupé et fendu, déjà rencontré sur la gravure du chant V, signifie l’entêtement dans la traîtrise : les sortilèges d’Atlant pour préserver Roger de la mort qui doit suivre son union avec Bradamante sont implicitement comparés aux stratégies de Polinesse pour s’emparer de Guenièvre.
Au centre, l’entrée dans le palais d’Atlant, puis la sortie du palais marquent le suspens et le renversement entre le monde anti-héroïque des enchantements à gauche et le monde héroïque des combats à droite, symbolisé vers le haut par le combat de Roland et de Ferragus. L’espace supérieur de la gravure enfin est consacré à la refondation symbolique : Roland défait les Maures et secourt Isabelle.
Cependant cet ordonnancement symbolique de l’espace est concurrencé par une importance de plus en plus grande accordée à l’organisation géométrale : le palais d’Atlant, avec sa cour dallée ouverte vers le spectateur tend à constituer un espace scénique restreint, face à l’espace vague ouvert sur le paysage, les montagnes, la ville loitaine. En haut à droite, les nuages n’ont aucune fonction que décorative, à moins qu’il ne suiggère que cet endroit de la gravure est précisément dévolu au vague de la rêverie...

Annotations :

1. Gravure en verso, page de gauche. Numéro de page en haut à gauche, 112. En-tête centré CANTO [DVODECIMO., p. 113].
3. Dans l’édition Franceschi, ce n’est pas Roland poursuivant le géant, mais le géant poursuivi qui occupe le premier plan. Pour le reste, la composition est très proche et dans le même sens.

Sources textuelles :
Roland furieux, chant 12 (le château-vortex d’Atlant ; Roland trouve Isabelle)
Sujet de recherche :
Iconographie du Roland furieux

Informations techniques

Notice #002182

Image HD

Identifiant historique :
A1501
Traitement de l'image :
Scanner
Localisation de la reproduction :
Collection particulière (Cachan)